Culture Bien Etre
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T comme Théatre

Cela semble tellement impossible à dire, « le théâtre ! », pour en parler sans avoir l’air de pontifier, comme un saint homme dans sa « papamobile », ou sans se donner l’air d’un chef étoilé prêt à confier en secret toutes ses recettes.

Mes théâtres….

Cela semble tellement impossible à dire, « le théâtre ! », pour en parler sans avoir l’air de pontifier, comme un saint homme dans sa « papamobile », ou sans se donner l’air d’un chef étoilé prêt à confier en secret toutes ses recettes.

Alors, dans cette cuisine-temple, de planches et de lumières, en ajoutant, en épices, un peu de possessif et de pluriel : on dira « mes théâtres » et on retrouvera un goût d’enfance et de liberté.

A mi chemin entre le sacré et le profane, ces théâtres, seraient comme à leur origine, un chemin de parole vers les dieux. Mais, le point de départ de ce chemin n’est plus l’autel (le tumélée grec, ou la représentation d’un « Dieu de nature » de l’ère des cavernes), non ! Ce point de départ et d’arrivée, est l’homme. Pas d’autel mais la recherche d’un temple intérieur où, transfiguré par la passion offerte, le plomb devient or, la parole commune devient poésie de scène, le mouvement des corps mise en scène et jeu d’ombres.

Dans cette cuisine-temple, de planches et de lumières, on y apprend à conjuguer ce pluriel, au féminin. Si je suis homme, les théâtres sont sœurs et maîtresses, mères et inconnues, femmes et filles en ce même temps des actes qui se jouent, au rythme lent, dense, des apparitions derrière le rideau rouge.

Donc, dans cette cuisine-temple de poussière précieuse, les théâtres sont déesses.

Voilà pourquoi derrière chaque arbre de nos planches, il y a des âmes vives qui courent et chantent, nymphes invisibles qui ne demandent qu’à s’incarner. Car, bonheur absolu, nous offrons nos corps, sans pudeur, à qui veut les cueillir comme autant de bouquets garnis. IN-CARNER, « prendre dans sa chair », voilà une presque parole biblique (ou de courtisane) qui raconte ce long travail du comédien. Il faut d’abord apprendre à se connaître ; puis il faut lentement s’effacer, gommant trace d’égo couche après couche, pour n’être qu’un beau vide, une magnifique caisse de résonnance qui amplifie la note, le chant sacré de l’auteur. Laisser la place dans son âme, au fantôme-personnage, pour qu’il grandisse en nous et fleurisse chaque soir à la même heure ; laisser l’espace vide pour que le rêve se détache et prenne un gigantesque relief. L’âme est plus grande que nos corps. Plus nous ouvrons l’espace et plus l’espace s’agrandit à travers elle ; nous prenons alors une valeur universelle : ce que je vis en rêve devant toi, c’est un peu de ce que toi qui vis, tu reconnais en moi. Tu te vois dans nos mille vies, spectateur, et tu souffres pour celui que tu n’es pas, peut-être parce qu’il te ressemble.

Le masque grec s’appelait « PER-SONNA », laissant à travers sa bouche qui riait ou pleurait, passer le son. Derrière ce masque la personne devenait personne ; et ce rien devenait personnage.

Voilà encore une (pas si sainte) trinité : Une personne qui devient personne pour se faire personnage.

Est-ce encore un jeu de déesse trompeuse ?

Car nos théâtres nous trompent. Ils nous font croire que nous ne vieillissons pas, que nous sommes immortels ou assassinés, éternels ou éphémères, en perpétuel renaissance. Et quand nous sortons de scène, nous sommes dans un âge qui n’est pas le notre avec un corps qui exulte mais qui n’est que corps, usé par le don de soi. Et nous sommes si seuls.

Alors, croyants volontaires nous retournons à cette cuisine-temple, pour un autre repas, pour une autre prière. Et le rideau se lève encore… bon appétit, Messieurs, Ô Ministres intègres…

Thierry Surace

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